L’enquête sur « Armes légères dans l’Est du Congo : Perception de l’insécurité » publiée par le service public fédéral Affaires étrangères de Belgique et le Programme des Nations-Unies pour le Développement, jette un pavé dans la mare à l’heure où la République Démocratique du Congo, RDC, se prépare à organiser ses prochaines élections présidentielle et législative, scrutin que tout le monde souhaite démocratique, libre et transparente, sans contradiction.
Georges Berghezan, chercheur au Groupe de recherche et d’Information sur la Paix et la Sécurité, Grip ET Xavier Zeebroek, Directeur du Grip, ouvrent non seulement un grand débat en cette période mais leur enquête vient remettre en cause certaines démarches déjà lancées et quelques actions engagées sur la récupération des armes à feu sur l’ensemble de ce vaste pays continent.
Les conclusions de l’enquête n’épargnent ni le gouvernement Congolais, ni la Police Nationale Congolaise avec les Forces Armées de la RDC, Fardc, encore moins la Monusco, Mission des Nations-Unies pour la Stabilisation du Congo, Monusco et les groupes rebelles étrangers de la région des Grands-Lacs.
Selon les chercheurs, jusqu’à présent au moins 300.000 (trois cent mille) armes légères et de petit calibre sont aux mains des civils dans les provinces du Nord et Sud-Kivu, du Maniema, du Katanga et la Province Orientale. Réalisée sur la base de plus de 10.000 (dix mille) interviews de chefs de ménages, d’une cinquantaine de discussions de groupes focaux et d’une cinquantaine d’interviews-clés, l’étude qui démontre comment la prolifération des armes à feu a pris des proportions dramatiques avec les différentes guerres de rébellion en RDC , dresse en même temps le profil sombre de l’insécurité et les zones de provenance des armes qui pullulent dans toutes les provinces ayant fait l’objet de l’enquête.
D’après l’étude, en Ituri, dans la Province Orientale, le principal mode d’acquisition des armes reste le ‘’marché noir’’, suivi de l’achat auprès de criminels et auprès de membres des Fardc ou de la Police. « Un marché aux armes se tiendrait à la frontière Soudanaise. L’ Updf, -Uganda people’s defense force, armée de l’Ouganda dans les zones frontalières serait directement impliquée dans ces trafics et échangerait parfois des armes contre des matières précieuses(Or…). Dans le territoire d’Aru, dans la même province, les principaux pourvoyeurs d’armes seraient la Spla, -Soudan people’s Libération army, armée du sud Soudan-des civils Soudanais et des bandits Ougandais. L’autre grand pourvoyeur d’armes serait l’armée Congolaise qui vendrait des armes à la fois aux malfrats et aux groupes armés.
La Police nationale a été également pointée du doigt, notamment par les responsables de la Direction Générale des Migrations. Mais selon le groupe ayant rassemblé le personnel académique de Bunia, la Monuc, actuellement Monusco livrerait également des armes aux groupes armés ». Les Fardc et la Police sont les principaux détenteurs d’armes dans diverses régions. Cependant la détention d’armes serait également courante auprès des criminels, des chasseurs-braconniers, des démobilisés, déserteurs et divers groupes armés. Au Sud-Kivu, indique l’enquête, les armes en provenance de Burundi dans cette partie de la RDC passeraient par la plaine de Ruzizi. Bukavu serait approvisionné à partir du Burundi, du Rwanda et de l’Ouganda ».
A Tanganyika, dans la province du Katanga, note l’enquête, les armes à feu, sont fournies par la Police, les Fardc. Selon les chercheurs, certains policiers et militaires de l’armée républicaine seraient à la base de transferts d’armes à des coupeurs de route, à des criminels pratiquent le vol à main armée ou à des exécutions sommaires. « Au Maniema, selon le Directeur provincial de l’Agence Nationale de Renseignement, Anr, les armes de chasse proviennent surtout du Congo-Brazzaville. Cependant il y’a des forgerons qui fabriquent artisanalement les armes de guerre dans la province ».
L’étude affirme globalement que les deux armes les plus fréquemment détenues par les ménages sont le fusil d’assaut (37,16%) et le fusil automatique (36,88%), suivis par la munition pour le fusil d’assaut (11,14%), l’arme de poing (10,03%) et la grenade (38,3%). Même si les disparités sont fortes d’une région à l’autre, concernant l’achat et l’acquisition de ces armes, les enquêteurs indiquent que le fusil non automatique est prédominant au Maniema (70, 46%) et au Tanganyika (41, 85%) tandis que le fusil d’assaut est le plus répandu au Nord-Kivu (42,45%), au Sud-Kivu (50, 24%) et en Ituri (52 ,22%). Dans l’ensemble de la zone couverte, plus d’une famille sur huit a été directement affectée par une agression armée au cours de six mois précédant l’enquête. Les villes les plus insécurisés par les armes et les acteurs d’insécurité sont : Bukavu au Sud-Kivu, Kabare au Sud-Kivu, Mahagi dans la Province-Orientale, Djugu dans la Province Orientale, Irumu dans la Province Orientale, Kindu au Maniema, Shabunda au Sud-Kivu, Mwenga au Sud-Kivu et Goma au Nor-Kivu. Les bandits et les Fardc reviennent le plus souvent parmi les principaux acteurs de l’insécurité. Quatre fois sur cinq, le vol arrive en deuxième position parmi les violences domestiques. En ordre chronologique, les territoires qui ont connu le plus de viols en RDC sont : Shabunda au Sud-Kivu, Kibombo au Maniema, Mwenga au Sud-Kivu, Mambassa en Ituri dans la Province Orientale, Kabambare au Maniema, Kindu au Maniema,Walungu au Sud-Kivu, Tanganyika au Katanga et Goma au Nord-Kivu, conclut l’étude. Pour les chercheurs, le banditisme, les activités des groupes armés étrangers et Congolais, les conflits ethniques, l’indiscipline des forces de sécurité, l’exploitation illégale des ressources naturelles alimentent la spirale de pauvreté et d’inégalités en RDC.
Pourquoi ne pas reprendre la quatrième de couverture : « Armes légères dans l’Est du Congo : perception de l’Insécurité » analyse d’abord le contexte sécuritaire de la RDC. Le livre donne l’évolution des conflits récents, la multiplication des bandes armées, les aspects législatifs, les actions de l’Onu et de différents gouvernements Congolais et les perspectives des désarmements. « Armes légères dans l’Est du Congo » présente les résultats d’une importante enquête. L’ouvrage constitue ensuite une banque des données et une mine d’informations inédites sur les armes légères : qui le demande ?, qui en possède ?, où les cache-t-on ?, quelle utilisation fait-on ?, comment sont-elles perçues ? Et quel est leur impact ? Le livre enfin toutes les réponses à ces interrogations. Une étude approfondie qui servira à coup sur à l’élaboration des futures politiques de réductions de la violence armée dans l’Est de la RDC et même dans la région des Grand-Lacs.
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