La moto à Kinshasa, capitale de la République Démocratique du
Congo(RDC), est devenue l’un des moyens de mobilité on ne peut plus incontestable.
La configuration actuelle de cette ville africaine avec, à la clé, une absence d’urbanisation et d’expansion
des nouveaux quartiers, en soi, des coins souvent difficiles d’accès, même à
bord d’un 4x4, a rendu indispensable ce moyen
de déplacement très prisé par des milliers de Kinois. Entre les arrêts de bus
et les habitations, la distance à parcourir est assez longue. La moto a la
facilité d’emprunter les ruelles et autres avenues sinueuses, impraticables
pour voitures qui ne peuvent surtout pas s’y hasarder pour une quelconque
raison.
Les motocyclistes (communément appelés les Wewa) en stationnement à Kinshasa CP: DR |
Et comme, les policiers de la circulation routière et autres agents
en tenue civile - communément appelés Bureau 2- ‘’affirmant être de la sécurité nationale’’, sont, en dépit de leurs modiques
salaires bancarisés (92.000 FC soit
environ 92 $ salaire mensuel), toujours visiblement sous-payés, mieux, mal payés, à la fin du mois, les
motocyclistes sont alors devenus,
pour eux, « de véritables vaches à lait ». Autrement, « des gros poissons » à attraper dans
les filets et de qui on peut arracher la manne vitale pour la survie. Ils sont
dans presque toutes les intersections et carrefours juteux.
Leurs tactiques sont simples : « Deux bureaux 2, très souvent postés, non loin d’un container,
faisant office d’un commissariat de la police du quartier, situé non loin d’une
intercession ou aux coins d’une grande avenue : leur lieu de prédilection.
Le moment venu, ils surgissent et interceptent
le conducteur de la moto, en toute brutalité, sans aucune vergogne du passager
ou de la passagère assis(e) sur la moto », explique Guy Lolango, un
jeune motocycliste plusieurs fois victime des bureaux 2. « Lorsqu’ils vous appréhendent, l’un se rue naturellement sur le guidon et en toute
célérité, retire la clé du contact. L’autre se charge de ravir la moto, la
traine jusqu’au container de la police.
Traumatisée par la brutalité avec laquelle les deux hommes ont intercepté la
moto, la personne transportée reste stupéfaite si pas hébétée. Aussi, est-on contraint
de se rendre au container, lieu final du piège tendu par les auteurs de l’acte,
sans aucune connaissance de l’infraction commise. C’est pour leur donner l’argent, sans motif valable », explique,
d’un air furieux Guy, qui se rappelle des faits comme si c’était, il y’a quelques minutes.
Dans le container c’est l’interrogatoire orientée pour
amener le conducteur de la moto à
accepter une faute non commise. Le prix à payer du motocycliste dépend de la
concision de ses propos. « Nous
sommes toujours en proie en désaccord avec les bureaux 2 jusqu’au container.
Pour trancher l’affaire, le responsable des policiers commis au container établit
le procès-verbal. Il vous demande de vous taire et vous ordonne de lui
expliquer les faits. Stylo à la main et feuille blanche sur la table, il vous
exige de vous décliner et vous demande de raconter le début de la scène. Il
peut écrire sur une quinzaine de papiers. Lorsque vous vous vider l’estomac en décrivant
la scène, le policier compte les papiers et vous demande de payer. Le prix d’un
papier revient à 500 FC. Donc il suffit de multiplier 500x7 pour deviner le
montant», raconte Guy.
Un carton d’A4 contenant cents feuilles blanches revient à 5.000
FC dans les papeteries de Kinshasa. Les motocyclistes pris plusieurs fois aux
filets des bureaux 2 ne s’étendent plus dans de longues explications. Ils sont
très concis et précis. Les procès-verbaux établit à leur sujet ne dépassent
point une feuille de A4. C’est le cas de Lolango Guy. « Moi, je ne prononce plus cinq phrases. J’en
prononce toujours deux : « Ils m’ont interceptés. Je ne me rappelle
pas avoir commis une faute. Point barre, voilà ce que je dis toujours même si
le policier du contenair insiste sur d’autres détails. Toutes les autres réponses
à ses interrogations ne resteront que gestuelles. Soit, je hoche les épaules. Soit, je fais signe de négation en secouant
la tête », détaille Guy avec un brin de sourire.
Le prix officiel des amandes à payer n’est point connu. Tout
dépend des humeurs des policiers des containers. Que ce soit la police de
circulation routière ou le ministère de transport, aucun d’eux n’a communiqué
le tarif des amandes à payer relatives aux infractions routières. Le silence
des autorités publiques à ce sujet intrigue les motocyclistes et les Kinois.
Au-delà de l’argent du procès-verbal, il faut débourser, environ 10.000 FC, au
bénéfice des bureaux 2.
‘’ Sans cela, la moto confisquée, restera autant d’heures et
des jours qu’il en faudra au container. Vaut mieux donner le montant exigé
plutôt de que gâcher la journée et perdre plus d’argent qu’on pouvait presque récupérer
auprès des clients’’, conseille Guy. Et de conclure : ‘’Un bureau 2 est un agent de renseignement
de l’Agence de la sécurité nationale (ANR). C’est honteux de les voir comme des
minables citoyens, multiplier des mauvaises stratégies, parce que mal payés à
la fin du mois par l’Etat, pour glaner des « madesu ya bana (haricots pour
les enfants), pots de vins, auprès des motocyclistes’’.
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